Quatrième de couverture:
1956 : par lassitude généralisée, un
certain Jack Kerouac accepte de passer neuf semaines en orbite autour de la
Terre pour le compte d'une compagnie de boissons gazeuses très connue... Sa
mission : contrôler les étendues vides et silencieuses de la portion d'espace
concédée â l'entreprise. Pendant ce temps, parce qu'il s'est épris d'une
libraire un peu spéciale - une certaine Marilyn Monroe aux lèvres argentées - un
certain Neal, ami dudit Jack Kerouac, entame une torride entreprise de
séduction... téléphonique sur une certaine Norma Jean Mortensen, l'épouse
délaissée d'un certain Arthur Miller qui n'est autre que le directeur du
programme spatial d'une compagnie de boissons gazeuses très connue... Toute
dissemblance avec l'histoire que vous connaissez est tout sauf une coïncidence !
Fer de lance d'une nouvelle génération d'auteurs puisant leur inspiration
dans les icônes de la culture populaire et les littératures de genre, Tommaso
Pincio, né à Rome en 1963, est également l'auteur d'Un amour d'outremonde,
hommage fulgurant rendu à Kurt Cobain, le chanteur du groupe Nirvana. |
Critique
1956 en Amérique : Jack Kerouac est
embauché par la Coca-Cola Enterprise Inc. dirigée par Arthur Miller, pour
surveiller une concession spatiale durant 2 mois, dans une capsule en orbite
terrestre. Avant, il est allé avec son ami Neal Cassady pour acheter un atlas
des étoiles dans une librairie étonnante où une des vendeuses, Marilyn Monroe,
fascine le chaland avec ses lèvres argentées réfléchissantes. Pendant que
Kerouac expérimentera le silence de l'espace dans sa retraite spatiale, Neal
n'aura de cesse de rechercher Marilyn, et pensera l'appeler au téléphone en
composant chaque jour un numéro aboutissant chez Norma Jean Mortensen, la femme
délaissée... d'Arthur Miller...
La postface précise (elle aurait été une préface, elle aurait pu prévenir...)
qu'il ne s'agit pas d'un livre sur Kerouac, Cassady, Monroe, du moins pas ceux
que nous connaissons (Kerouac y est-il écrivain ? Marilyn n'est en tout cas pas
actrice...). Pourtant, il s'agit de s'appuyer sur ce que nous savons de leurs
modèles tout en les observant dans ce roman comme des personnages nouveaux, ce
qui donne une impression étrange, originale, et agréable quand on croit déceler
une similarité, une clef, grâce au souvenir que nous avons de ces célébrités
populaires ayant marqué leur temps (*).
Ce court roman se lit de façon très fluide malgré son étrangeté. Le tout est de
jouer le jeu. Il y a des scènes vraiment délirantes et jubilatoires comme
l'achat du livre à la librairie ou le dialogue par radio entre les contrôleurs
spatiaux, beaucoup de poésie aussi, et des passages (courts) qui me sont restés
totalement obscurs... Kerouac cherche à vivre un face à face avec le vide
silencieux de l'espace. Que transgresse-t-il quand il signale entendre un
gémissement et ne voir aucune étoile ?
S'agit-il de science-fiction ? Dans la mesure où, en 1956, Jack Kerouac n'était
pas en orbite géostationnaire ni Marilyn Monroe au guichet d'une librairie de 3e
type, oui, sans doute. Mais n'y cherchez pas une intrigue à la Hyperion : encore
une fois il faut se laisser mener dans un univers bizarre où nous sont déjà un
peu familiers des personnages sensés être inconnus.
J'ai aimé, mais d'avance j'aime Kerouac et Cassady, et j'ai eu l'impression d'un
peu les retrouver dans ce petit bouquin, même si ça ne doit pas être un but.
(*) 1956 en Amérique : Jack Kerouac est embauché comme guetteur au sommet de
Desolation Peak, pour surveiller la forêt, seul et isolé, et signaler au plus
tôt les incendies, avec pour unique moyen de communication une radio, surtout
utilisée entre les autres guetteurs pour passer le temps. C'est l'occasion d'une
expérience mystique (bouddhiste) pour l'auteur de "Sur la route", qu'il évoquera
dans "Les Clochards Célestes".
Fabrice Tual (septembre 2003) |