Christophe Lambert
est né en 1969 en région parisienne. En 1979, son père l'emmène au cinéma voir
Star Wars. C'est le choc, dont il ne s'est toujours pas remis ! Il a
suivi des études de cinéma, réalisé plusieurs courts-métrages, travaillé pour
la télévision (M6) et dirigé des ateliers vidéo dans les collèges. Mais c'est
l'écriture qui le motive vraiment.
Il débute avec
Sitcom en péril (Vertige policier, 1996), un polar plein d'humour se
passant dans les milieux de la télévision qu'il connaît bien. Dès son premier
roman de science-fiction dont l'action à pour cadre un bagne orbital (La
Nuit des mutants -Vertige SF, Hachette Jeunesse, 1997), il obtient le Prix
Ozone et décroche la sélection Culture Collège de Je bouquine. Situé
entre Alien et Les Dix petits nègres, Meurtres à 30 000 km/s
(Vertige SF, 1998) confirme le goût de l'auteur pour les angoissants
huis-clos spatiaux. Après un détour par le fantastique (Pages blanches et
magie noire, Vertige Cauchemar, 1998) et un autre roman policier (Console
à haut risque, Vertige Policier, 1999), Christophe Lambert revient en
force à la science-fiction avec un haletant roman-catastrophe,
Titanic 2012
(Hachette, 1999). Publié hors collection jeunesse, ce roman démontre à
l'évidence que l'auteur n'a pas l'intention de se limiter à une tranche d'âge,
ce que confirme
Les
étoiles meurent aussi, un polar
scientifique paru dans la collection Quark Noir (Flammarion, 2000). Il a
publié plusieurs romans dans la collection Autres Mondes tel
Le
souffle de Mars
sur la colonisation de la planète rouge, paru
en avril 2001 ou encore Souviens toi d'Alamo
qui aborde les thèmes du
voyage temporel
et des
univers parallèles.
La page
de Christophe Lambert sur le site de la nooSFère .
Le dossier
"Alamo" sur le site Autres Mondes.
Le site Autres Mondes.
La Porte
des Mondes: Comment es-tu venu à l'écriture?
Christophe Lambert: D'aussi loin que je m'en
souvienne, j'ai toujours eu envie de raconter des histoires. C'est vraiment mon
moteur dans la vie. Quand j'étais enfant, je voulais faire de la B.D.. Ado, je
rêvais d'être réalisateur. J'ai finalement fait mon trou dans la littérature.
Mais je ne désespère pas de revenir un jour à mes premières amours.
PdM:
Pourquoi les littératures de l'Imaginaire?
C.L.: J'ai du mal à m'insérer dans le
quotidien, comme beaucoup de « raconteurs d'histoires » je pense. J'ai sans
doute du mal à devenir adulte. Les genres comme le fantastique, la
science-fiction ou la fantasy permettent de prolonger les univers de l'enfance
parce qu'ils un côté très ludique. Créer son monde, c'est comme jouer avec une
sorte de train électrique géant. Et puis quand on écrit un roman de S.F., on
peut s'offrir le plus beau studio d'effets spéciaux du monde: l'imagination!
PdM : Serais-tu atteint du "syndrome de Peter Pan"?
C.L. : Sans doute, mais je me soigne : j'ai un métier, une compagne, deux enfants... L'imaginaire, c'est
génial, mais il faut le transformer en créativité concrète et ne pas rester au stade de la simple rêverie
(surtout quand on veut en vivre) !
PdM:
Quels sont tes auteurs préférés, toute forme de littérature confondue?
C.L.: Adolescent, j'étais vraiment
subjugué par Stephen King. Je dévorais ses gros pavés les uns après les autres.
Vers 18-20 ans, j'ai eu ma période écrivains « réalistes »: Djian, Brautigan,
Bukowski, Fante. Depuis quelques années, je suis en pleine phase SF : Dick,
Simmons, Crichton ou encore la série des Honor Harrington, chez l'Atalante. Chez
les auteurs français, j'ai été très marqué par Brussolo, même si j'en lis moins
ces derniers temps. J'admire les idées de Colin ou encore les univers de
Genefort, même si je n'accroche pas forcément aux histoires de ce dernier.
PdM:
Quelle est ta formation?
C.L.: Bac B (économie) puis une école
d'audio-visuel, l'ESRA. J'ai réalisé plusieurs courts-métrages avant de jeter
l'éponge. L'écriture convient sans doute mieux que la mise en scène à ma nature
introvertie.
PdM:
As-tu choisi d'écrire des romans jeunesse parce qu'il est plus
"aisé" de faire
rêver un public jeune ?
C.L.: Si l'on part du principe (comme
Hitchcock) que raconter une histoire, c' est manipuler le lecteur, alors oui, le
public jeune est plus facile à manipuler. Si je prends la métaphore des échecs,
disons qu'il est plus facile d'avoir un coup d'avance sur le gamin qui ne
connaît pas encore toutes les ficelles de la narration que sur le vieux routard.
J'avoue que j' ai moins de scrupules à utiliser les recettes éprouvées des
feuilletonistes avec un jeune public qu'avec les adultes; idem pour certains
clichés véhiculés par les « séries B » ou les B.D. classiques. Les grands
archétypes du style l'infâme traître, le vieux sage ou le
compagnon faire-valoir fonctionnent encore de nos jours (cf. Harry Potter),
même utilisés au premier degrés. Cette mise au point effectuée, il ne faudrait
pas croire que l'écriture « jeunesse » vous dédouane de toute contrainte, bien
au contraire ! Les auteurs jeunesse doivent être toujours lisibles, toujours
clairs, accrocher le lecteur dès le début, faire progresser l' histoire tambour
battant, garder la tension constante, etc. C'est loin d' être évident.
PdM:
Et qu'en est-il des romans pour un public plus âgé?
C.L.: J'en ai déjà écrit un,
Les
étoiles meurent aussi, chez Flammarion, et j'aimerais bien renouveler
l'expérience. Ceci étant dit, je considère la plupart des livres que j'ai publié
avec Denis Guiot, comme des aventures tout public et pas du tout cantonnées à
la jeunesse. Je pense en particulier à
Titanic 2012,
Le
souffle de Mars,
Clone connexion, Souviens-toi d'Alamo.
PdM: Pour
tes romans quelles sont tes sources d'inspirations?
C.L.: Les films, mes lectures, l'actualité.
PdM:
Pourquoi avoir choisi ce thème du voyage dans le temps?
C.L.: Je voulais écrire un roman sur Alamo
depuis des années, mais j'avais du mal à trouver le bon angle d'attaque. En
1997, alors que je visitais le faux fort Alamo construit par John Wayne à
Brackettville (Texas), je suis tombé sur une photo du décor dans lequel on
voyait des G.I. en uniforme marcher au milieu de toutes ces vieilles pierres.
J'ai trouvé ce contraste intéressant et c'est là que j'ai eu l'idée du voyage
dans le temps, je crois. Ensuite, il fallait définir comment j'allais projeter
mes héros du XX ème siècle en 1836. J'ai joué un moment avec l'idée suivante :
un bataillon de rangers est en manœuvres, en 1945, dans le désert où l'on a
testé les premières bombes H (près de Los Alamos), et pour une raison X (type
expérience de l'armée), tout ce beau monde disparaît pour réapparaître dans le
Texas en guerre de 1836. Le hic, c'est que je n'ai jamais trouvé de « raison X »
réellement convaincante. Mais j'aimais bien l'idée des gars qui partent de Los
Alamos pour arriver à El Alamo, comme si c'était un pied de nez du destin. Tout
cela a fermenté durant des mois et des mois, et puis un beau jour, je me suis
souvenu d'une nouvelle que j'avais écrite pour Nathan où il était question de la
patrouille d'Avengers disparue au dessus du triangle des Bermudes. Et là,
la connexion s'est opérée en quart de seconde. Le plus dur , c'est ça, avoir
l'étincelle, car ça ne se commande pas. Ecrire le roman n'est presque plus
qu'une formalité ...
PdM:
Pourquoi Alamo? Qu'est-ce qui t'a attiré dans cette épisode de
l'histoire américaine?
C.L.: C'est une histoire universelle. J'ai des
convictions, comme tout le monde. Je vote. Mais serais-je prêt à mourir
pour ces convictions ? Alors là, c'est une autre paire de manches. Les
défenseurs d'Alamo n'étaient pas des soldats professionnels : il y avait des
avocats, des commerçants, des maréchal-ferrant. Attention, je ne dis pas qu'ils
avaient raison (le Texas appartenait au Mexique qui n'avait bien sûr aucun
intérêt à leur en faire cadeau), mais tous ces gens s'estimaient dans leur bon
droit. C'est bien le drame en ce bas monde : chacun a ses raisons. Rien n'est
simple, contrairement à ce qu'aimerait nous faire croire Bush Jr. J'ai essayé de
montrer cette complexité des conflits dans le roman.
PdM:
Quelles ont été tes sources, tes clins d'oeil ?
C.L.: Pour les sources, c'est simple, j'essaye
de lire tout ce qui s'écrit sur le siège d'Alamo depuis vingt cinq ans et, comme
je l'ai dit plus haut, j'ai été faire des recherches au Texas en 1997 (le voyage
est relaté en détails dans le site
Autres Mondes). Question clins d'oeil, il
y a bien sûr le film de Wayne. J'ai tenté de reproduire à ma sauce l'atmosphère
de certaines séquences (le raid nocturne, le moment du choix, la nuit avant
l'assaut, la mort de Crockett, etc.). Il y a également un hommage à la
Horde sauvage de S. Peckimpah, quand le général mexicain tire sur tout
ce qui bouge avec une mitrailleuse lourde. En cherchant bien, on doit trouver
une ou deux répliques de Star Wars (il y a toujours une ou deux
répliques de Star Wars dans mes livres). Pour les personnages, on
nage en plein Buck Danny. Sauf que pour le surnom du petit rouquin
rigolo, j'ai choisi Looping, à cause du pilote doux-dingue dans
L'agence tout risques. Quand au surnom papy, il vient d'une autre
série télé : Les têtes brûlées ! Hum, vous voyez, c'est un
cocktail assez hétéroclite.
PdM: Par
moment, j'ai eu l'impression de trouver des similitudes avec le roman Nimitz, écrit par Martin Caidin.
Est-ce un hasard ?
C.L.: Bien sûr, comme le siège d'Alamo est un
moment charnière de l'histoire, on se retrouve avec l'éternelle thématique :
doit-on ou non changer le cours des évènements ? J'ai voulu apporter une petite
variante en introduisant la notion d'univers parallèle dans ce dilemme. Je n'ai
pas lu le roman, mais j' ai vu le film Nimitz il y a une bonne
quinzaine d'années. J'en garde surtout le souvenir d'une frustration : j'étais
très déçu de ne pas voir la bataille finale avec le porte-avions et les Zéros japonais. En fait, si un film doit vraiment servir de référence à
mon roman, ce serait plutôt un long métrage japonais sorti en 1982 qui
s'appelait Les guerriers de l' apocalypse si ma mémoire est bonne.
Une patrouille motorisée de soldats se retrouvait téléportée (par je ne sais
plus quel phénomène) dans le Japon médiéval. Il y avait de grandes batailles
épiques avec des milliers de samouraïs ; ça m'avait beaucoup marqué.
PdM:
Quels sont tes projets pour l'avenir ?
C.L.: Je viens de terminer un nouveau roman sur
les sectes et le clonage, sujet brûlant s'il en est, qui devrait sortir chez
Mango en septembre prochain. En ce moment, je réfléchis à un projet de B.D. avec
le dessinateur Jean Barbaud. Encore une histoire d'avions, mais dans les années
trente cette fois, et en Amérique Latine.
Interview réalisée en janvier 2003
© Pedro Mota.
La notice biographique a été rédigée par Denis Guiot.
Le site Autres Mondes. |